Le couteau

Image blanche, ramassée au bout de la barque,
glisse ta lame dans les tissus de l’eau
Suzanne Jacob

Les fleurs dans le parterre se sont multipliées.
   Trente-quatre ans hier. Et pas un frémissement, pas une goutte, pas même un bruit de plastique. Tout est limpide et trouble, lié et détaché, rien de gonflé ni de suspect. Les minutes glissent et rebondissent comme des perles sur un plancher.
   Ça fait cent fois au moins que je passe à côté des mots.

Dans ma lune ascendante, les écoulements s’apparentaient à des plissements argentiques. Toi qui aimais tant les rivières, je n’ai jamais trouvé le creux de ton épaule. 
   Les mensonges qu’on t’a servis. C’était du temps où les saisons s’en allaient de ton corps. L’air se vidait de ton ivresse, tu n’attendais plus de sursis. J’en voulais déjà à l’époque à ce qui vient déposséder d’autant d’aubes tranquilles. Tu n’y verrais plus le poisson ni la cascade.
   Ce qu’on dit et prétend. Le couteau qui reste le même, sur la rive ou ailleurs.

Photo : LA COULÉE DU SILENCE – Hier * Montréal

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