Cette humidité, où flottent des parfums de fleurs et de terre. La montagne est tranquille, il a plu fort ce matin. À gauche, à droite, personne. Je me suis assise pour t’écrire un peu. Te dire l’intensité des odeurs. Et ce vert, celui qui vient juste après le tendre, tout plein de lumière encore.
Il n’y a presque pas de vent, seulement quelques froissements ici et là, mais rien vraiment. Et à chaque pas, ces odeurs en suspension dans l’air gorgé. Comme celle des deux grands chevaux de la police montée, croisés tout à l’heure, plusieurs centaines de mètres derrière. Mais je reconnais le parfum âcre de leur peau, cette odeur grasse que j’aime sans trop savoir pourquoi. Elle est restée piégée ici, dans des bulles d’humidité, du moins c’est ce que je m’imagine.
Bref, cet air chargé de parfums. Qui me fait inspirer plus fort que d’habitude, comme si je buvais des gorgées de paradis. Un merle vient de chanter doucement au-dessus de ma tête, c’est le paradis ça aussi. Et là un homme, surgi de nulle part, qui pousse une femme en fauteuil roulant, sur ce chemin raboteux. Ils se parlent à voix basse. Il a tourné la tête et m’a souri, le regard paisible. Ils s’éloignent maintenant. Sans que j’aie vu son regard à elle, resté plongé dans la forêt.
Il recommence à pleuvoir. Je suis bien sur ce banc, sous les arbres.