devant la grive ce matin
qui n’est pas venue seule
et tous ces bourgeons roses
j’aimerais n’y voir qu’un hiver
à dos de poésie
cinquante aurores
dans la blancheur du monde
mais le passé est fin voleur

PHOTO : CHÈRE ODILE – Montréal * Avril 2022
devant la grive ce matin
qui n’est pas venue seule
et tous ces bourgeons roses
j’aimerais n’y voir qu’un hiver
à dos de poésie
cinquante aurores
dans la blancheur du monde
mais le passé est fin voleur
PHOTO : CHÈRE ODILE – Montréal * Avril 2022
bien sûr que j’y suis
sans trop de vérité –
le ciel s’essaie au bleu et la lumière est pâle
j’ai abimé un autre livre à le traîner partout
et si la beauté suffisait
surtout prends-moi sans trop penser
je ne saurais pas défendre ma forte dépendance
pas plus que démêler le sens de mon coeur et de l’aube
et tout ça me prendrait la tête
et ma tête, tu sais
PHOTO : CES ÉLANS DE PLUIE * Montréal * Avril 2022
Je n’ai pas oublié
vos grands cercles d’adieu.
Ni d’avoir touché la splendeur
plus fort que tout le reste.
D’y voir l’eau troublée par le vent
aurait pu me suffire à pénétrer le monde.
Et là, cet étrange parfum qui sent
l’amour qui ne sait pas. Le souffle d’un revers.
Quand même je reste désarmée.
Que ne m’emportent pas les danses ridicules.
Quitte à être avalée par le jour et l’errance.
L’oiseau voit mieux que moi
tout le vent à se prendre.
PHOTO : LUMIÈRE CENDRÉE * Avril 2022
Si le temps comme un vent
sème les fleurs de l’habitude
y a quand même des jours
devant les chagrins qui se jouent
une voix de spleen comme la tienne
vient me bercer un peu
Autant de rivières détournées
Le ciel est blanc autour des branches
et c’est dimanche –
j’irai gratter un peu la terre
·
PHOTO : LOVERS WALKING – Montréal * Avril 2022
c’est le même piano encore
et j’y cherche mes mots
et aussi à briser
le grand dos de l’orgueil
le cheval était fort et blanc
et je me sors de cet hiver
avec quelques sabots de larmes
et là maintenant
ce même visage qui s’empare
du coulant de la pluie
toujours l’instant y trahit l’autre
que le temps y bouge
PHOTO : CE QU’ON NE VOIT JAMAIS VENIR – Montréal * Avril 2022
Y a-t-il vraiment plus amoral que ces personnes dites morales,
ces entités dites sociales – les anglais disent corporations,
ça fait déjà un peu moins mal.
Dans la fracture béante, le silence est assourdissant.
C’est une prise d’otages après l’autre.
Une espèce en perte de mots à force de se taire.
Sans doute n’ai-je de réel pouvoir que celui de mon amitié.
Et d’un peu de tendresse.
PHOTO : ET PARTOUT LA BEAUTÉ DES ARBRES – Montréal * Avril 2022
On y verra des puits et des petites mers
nos vertiges pour la énième fois –
et le grand cheval blanc reviendra de sa peine
Redoutable mémoire qui harde nos saisons
toujours une autre porte
qui s’ouvre sous la lune par les brises de soi
Je pose mes valises
en dansant sur ton quai mes états voyageurs –
on y reste au plus près
et j’entends le printemps et les oiseaux rieurs
PHOTO : SUR UN GRAIN DU SILENCE – Montréal * Avril 2022
c’est encore la lune
comme une vieille adresse
quand la neige s’en va
c’est l’hiver qui remonte
à la sortie du cinéma
j’ai dit tu vois
c’est le manque d’ambition
du moins de celle qu’on disait
qu’il nous fallait avoir
on m’a boxée dans le grand ring
de tant aimer y danser seule
et cette étrange liberté
dont parlait Marguerite
j’aime mes pieds sur le plancher
plus que les chameaux racornis
PHOTO : DE L’IMPORTANCE DU TEMPS – Montréal * Avril 2022
tout se passe quand même –
les heures et la lumière
comme hier, les pieds dans les flaques
les reflets dans la coupe au bord de la fenêtre d’un café branché
de ce côté-ci, sept heures après toi –
il y a une heure à peine, le ciel était franc noir
près des fils électriques
ta douleur n’est pas mienne –
mais quelque chose d’un miroir sur mes jours
une même terre de naissance
·
PHOTO : APRÈS LA PLUIE – Montréal * Avril 2022
Le matin, tôt. Ta voix et je savais. Depuis l’arrière, ça s’entendait. Dis-moi aussi, le rose dans le ciel d’hier, c’était toi? Je t’ai entendue en cascade, et je t’ai vue, du moins je pense.
Qui sait où va le temps. Et l’innocence. Quoi qu’il en soit, ça endure ici-bas. Le monde craque à peine sous le poids du lucide. Les bas-fonds s’entrecroisent. Au sein même des absences. Dans les éclats de pluie et de rouge écarlate, partout comme ailleurs.
Oui, je sais. Tout ce qui danse quand même, parce qu’il faut bien danser. Même quand le jour hallucine. Qu’il ressemble à un deuil. À un dégrisement. À un pays lointain, plus près des océans. Des miroirs profonds où vont boire nos âmes.
PHOTO : DÉJOUER LA BÊTE – Montréal * Avril 2022