
Pardubice, Tchéquie, environ 1895.
Je me suis assise une bonne heure devant le fleuve ce matin. Dans un petit parc qui longe l’eau. J’étais venue hier, mais il faisait trop froid pour rester immobile.
Près du parapet, deux bancs de bois sont tournés vers l’autre rive. De là, on peut admirer le fleuve dans toute sa largeur, sur quelques kilomètres d’un côté et de l’autre. On y voit bien le quartier d’en face, à flanc de colline, qui semble abriter surtout des maisons d’après-guerre, assez pareilles les unes aux autres, et de beaux grands arbres, plantés sans doute à la même époque. À part les cimes qui valsent au vent et quelques rares passants, on dirait que rien n’y bouge trop. Au plus près du rempart, une vieille église en pierre et un immense saule pleureur viennent achever le tableau. J’y traverserai bientôt. Pour l’instant, je suis contente d’admirer de loin.
Je rêvassais dans le petit parc, je pensais à toi, à nous, à ces récentes années qu’on a laissé passer dans trop de silence peut-être, quand une femme est sortie d’une des maisons qui bordent l’eau. Elle portait un long manteau noir qui lui descendait jusqu’aux chevilles. Elle s’est immobilisée quelques secondes sur le trottoir. Puis elle est repartie, d’un pas lent et lourd. Je l’ai suivie des yeux jusqu’à une autre maison, à côté de l’église, où elle est entrée sans frapper.
J’ai imaginé qu’elle allait y voir son amant, ou qu’elle venait de le quitter et rentrait chez elle. Je me suis raconté l’histoire d’une femme qui n’avait pas résisté à son désir.
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Photo : INCONNUE / LA BELLE ANDROGYNE – Fait partie d’une collection de vieilles photos qu’une amie m’a offertes et qui proviennent du grenier d’une vieille maison de la Caroline du Nord. Celle-ci a été prise à Pardubice, en Tchéquie, autour de l’an 1895 par K. Stoklas, photographe.
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Poésie et photographie
(Montréal, Québec)