Frimas de décembre

Ton sommet givré : un paysage rare.
Mais c’est toi, toujours, dans ta même grandeur.
Toi, montagne de mon coeur.
Qui m’as beaucoup donné, et sauvée aussi de quelques mauvais jours
à m’enfoncer trop loin dans mes pétrins imaginaires.

Vendredi, beaucoup d’âmes ont foulé ton grand serpentin.
À pied, en skis, en raquettes. Et quelques accros en vélo.
Inspirées par la neige, les vacances, le soleil.

Quant à la mienne, d’âme,
elle a trouvé ce qu’elle voulait.
Et la descente de ton flanc
à la lumière du jour tombant
lui a été divinement douce.

carolinedufoursommetglaceCcarolinedufoursentierDE FRIMAS ET DE NEIGE (diptyque) – Montréal, le 27 décembre 2013

Barbiers et gentillesses

Il me présente aux autres en disant que je suis sa fille.
Est-ce parce que dans son monde,
on ne fait pas la nuance entre fille et nièce?
Quoi qu’il en soit, ça fait une mèche que je ne démens plus.

On venait d’arriver.
On attendait que le barbier ait fini la tête de l’autre monsieur.
Depuis que son rasoir électrique a rendu l’âme, on y va de temps à autre.
C’est moins de trouble que le rasage quotidien.
Et ça ajoute à la courte liste de ses contacts humains.
Son barbier est vraiment fin avec lui.
Il le fait rire. Le taquine tant qu’il peut.
Avec toujours beaucoup de gentillesse.
Et pour le réveillon, ça s’imposait bien sûr.
Je m’étais assurée déjà que le salon serait ouvert le 24.
Pour qu’il arrive sur son trente-six dans la famille.

J’le trouve beau.
Certains se diront que je divague, extravague, radote, m’égare.
Ou que je ne vois pas clair.
Reste que c’est vrai, je le trouve beau.
Sans doute parce que je l’aime.
Et que je vois la même chose dans ses yeux.
Sans autres questions jamais.

carolinedufourgaby3 sigChez le barbier, quelques heures avant le réveillon – Montréal 2013

Fanfreluche dans la neige

La lumière y était.
Le temps, l’air aussi.
Et cette silhouette dans la distance.
Mon oeil de renard s’est approché.
L’hiver, le soir, marcher sous les lumières de la ville.
Quand la neige est neuve.
Y a quelque chose qui me rassure.
Comme une caresse de fin de jour,
une belle histoire de mon enfance.

carolinedufourfanfrel2cadcoCONTE D’HIVER – Soir de décembre 2013, Montréal

Quelque part une âme

La neige s’en est mêlée.
Pour rendre l’effet de contraste encore plus vibrant.
C’est le mariage extrême des lumières et des ombres
qui rend ces lieux de traverse si attirants.

Je serais restée là longtemps,
l’oeil perché discrètement,
jusqu’à ce que quelqu’un m’offre à son insu
un profil humain pour faire vivre l’image.
Ç’aurait pu être un chien aussi. Ou un chat.
Mais je n’ai pas eu besoin d’attendre.
Comme un acteur qui connait bien son rôle,
un homme s’est avancé vers la noirceur.

J’aurais voulu que je n’aurais pas su.
Faire mieux que le moment, j’veux dire.

carolinedufourNvidel2Sous le viaduc de Lorimier (Montréal) – 17 décembre 2013

L’insoutenable légèreté de l’être

Ça y est. C’est parti.
On a eu la première vraie de l’hiver.
Une belle grosse bordée.

Dehors, tous pris dans la même histoire,
les gens se sourient davantage.
Les « drames », même petits, sont rassembleurs.
N’est-ce pas d’ailleurs l’absence de vrais drames collectifs
qui fait que l’individualisme résiste si bien
dans ce coin-ci de la planète?
La vie, pour beaucoup d’entre nous dans cette ville,
relève d’un quotidien sans trop d’écarts.
Et les tempêtes de neige, en bons petits drames de rien,
nous ramènent un peu dans le monde.
Avec des tonnes de flocons blancs.

carolinedufourneigeLA PREMIÈRE VRAIE BORDÉE – 15 décembre 2013 – Rosemont (Montréal)

Le mont Royal

La montagne, vue du parc Jeanne-Mance.
Il y a quelques jours.

Devant chez moi, tout est blanc.
La neige est tombée toute la nuit.
Et elle tombe encore.

Je fais partie de ce monde.
De ces changements de saison.
De cette lumière qui grandit.
Et de celle qui meurt aussi.
Et je n’y peux rien.
La gorge me serre un peu en l’écrivant.
C’est dimanche.
Drôle de jour que le dimanche.
Mon enfance, sans doute.
C’était pas une journée comme les autres.

On est allés chercher un arbre hier.
Pour la magie que ça apporte aux enfants.
On va le décorer aujourd’hui.
Merci à toi, sapin.

parcJMautre2sigcadbLA TRAVERSÉE DU PARC – Montréal, décembre 2013

Regards

Je l’ai vue de loin.
Elle est restée là immobile
pendant plusieurs minutes
devant cet être majestueux.
Les yeux levés, tandis que son âme s’inclinait.

En passant près d’elle,
j’ai lancé « il est beau, hein? »
Elle a tourné son visage vers moi
et m’a dit « magnifique ».
Le mot n’a jamais sonné aussi vrai à mes oreilles.
C’était avant-hier, sur la montagne.

J’ai poursuivi mon chemin.

carolinedufourinclautre3c3Sur le mont Royal, décembre 2013

Le même géant

Un bel arbre, en hiver.
Un géant.
Le même que celui d’il y a quelques mois,
mais dans la saison qui commence.
Il ne bronche pas.
Qui sait, peut-être même qu’il se réjouit.
Un temps de repos, qu’il pense.
Pour me refaire des forces.
Me remplir de cette autre lumière.
C’est beau la neige.
C’était une bonne idée de la faire blanche.

carolinedufourgeant3 1000Quelque part dans Villeray, le 9 décembre 2013

L’histoire qu’on (se) raconte

J’ai choisi une belle histoire.
De regarder ma vie comme une fleur unique.
Belle et incapable d’être autrement que ce qu’elle est.
Sans doute, comme cet ami qui m’a écrit hier,
suis-je une rêveuse de large.
J’appartiens peut-être à cette espèce pour qui
l’adulation ou la plus grande richesse
ne saurait être présage de l’horizon convoité.
Cette espèce qui avance sans pavillon,
vers quelque part, sans trop savoir où,
sinon que ce quelque part ressemble
plus que toute autre chose
à l’amour et la liberté.

carolinedufour-reveurdelargesigLE BEAU RÊVEUR (Pour JL) – Viaduc Masson, Montréal, le 5 décembre 2013

Étages humains

L’idée qu’on puisse être comme ça,
si près les uns des autres,
à vivre des vies si différentes.

Empilés, les uns par-dessus les autres.
Endormis, les uns au-dessus des autres.
Ouf, sortez-moi d’là, j’étouffe rien qu’à y penser.
Et pourtant.

J’imagine qu’on est ce qu’on pourrait appeler une belle espèce grégaire.
Capable d’au moins une certaine proximité. D’un certain amour.
Sinon, on s’entretuerait, c’est sûr.

Méchant contrat tout de même. La vie en étages, j’veux dire.

carolinedufourentredeuxEN MONTANT L’ESCALIER – Montréal, le 5 décembre 2013

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