Les longs trottoirs

le coeur devient
boiteux devant les conjectures
mais il y a l’hiver
et ses rafales blanches
les yeux du tendre et les
longs trottoirs gris
et mes ambulations
et mon café facile
et puis dessus mes mains
et quelques pieds peut-être
les froidures qu’il me reste
à marcher dans la neige

Photo – LA GORGÉE D’EAU – Le 27 janvier 2020, 19:09 * Montréal

L’hiver de Liam

Le temps se jette ailleurs depuis qu’elle est partie, me dit-il. Je remplis mes jours et mes soirs à regarder le monde. À y chercher les raisons du pourquoi, et je ne vois toujours pas.

L’existence est étrange. On croit y trouver et on perd, y perdre et on trouve. On craint l’hiver et on se rend compte qu’il nous entraîne dans un lieu chaud à l’intérieur. Je l’ai regardé arriver l’hiver, je me disais qu’il allait m’achever, me brûler le coeur à vif. Et pourtant, ces jours-ci, je le sens qui me soulève, me porte à bout de neige, à bout de ciel, à bout de belles tempêtes.

Je sais qu’elle ne reviendra pas. J’ai voulu le croire. Mais la nuit va où elle veut.

 


Photo – MARCHE DU SOIR – Le 23 janvier 2020 * Montréal

Le crime

sur ma tête la neige tombe
belle et chantante dans le jour clair
après je ne veux rien
seulement des métaphores
et un long chemin de baisers
quelques notes peut-être
non mais vraiment
le reste, je n’y tiens pas
seulement quelques mots s’il vous plaît
pour y descendre à bout de ciel
et remonter
m’accoter au bord du vertige
dans le vestiaire ou bien ailleurs
avec mes bottes aux pieds ou sans
pourquoi me lyncherais-je en silence
me condamnerais-je d’avance
il serait là le crime, non?

Photo – UNE SI BELLE TEMPÊTE – Le 20 janvier 2020 * Montréal

Vent binaire

un blizzard
a touché le jardin et
contre la fissure, le corps
s’est déposé

dehors, tout était resté blanc

et là, aussi patiemment que le temps
le matin pose
des ombres sur la neige
à coups de ciel bleu

 


Photo – VIADUC – 15 janvier 2020 * Montréal

Sur un matin de grêle

Une journée mouillée, mise en nostalgie.

Ils ont fait hier ce qui change la donne.
Et c’est devenu ça. Là, à l’ombre du soir,
sans remords ni épaules basses. Dans le doux bâillement
qui enfante des matins tendres.

C’est toujours sans l’avec de la volonté
que bruissent, glissant dans l’heure,
d’autres sables vivants.

Et tout le reste, que le temps sait déjà.


Photo – PLUIE – Hier à 20:56 * Montréal 2020

Lames lestes

et tu t’ancres
au sol de chaque pas
y a pas de manque d’air
ni de prison d’eau
tu brouilles un peu les cartes
et déjoues la mémoire
au vent ta voix
se brise en lames lestes
ondule
comme un soupir de vague

 


Photo – ET LÀ DEVANT – Hier, dans le Mile-End * Montréal 2020

La part visible

une cuisine, se dit-elle
un lit, un piano
un coin pour la peinture
et un pour l’écriture

Des corneilles survolaient le parc. La naissance était imminente. Elle n’avait qu’à repérer la maison et tout irait bien. Mais le vent à lui seul serait-il assez?

Ses yeux se posèrent sur une verge d’or. Lui revinrent alors les mots de l’amie. « On appartient au rêve. On desserre l’étau mais le mystère subsiste. On cherche ce qui nous fait, ce qui nous ressemble. »

Par chance, le temps s’offrait à elle. Avec de l’espace pour le prendre.

Photo – SOUS LA NEIGE MUSE – Hier, par ma fenêtre * Montréal 2020

Le vent et la faille

la tête près du genou
c’est le matin
la neige n’a pas fondu

chavire, qu’elle entend
laisse faire le vent et la faille
le jour t’attrapera, qui t’a tirée vers l’aube

l’hiver est un long port
blanc de remous et de rives

 


Photo – AU GRÉ DE NOS HISTOIRES * Un instant d’hiver – Montréal 2020

 

Au rêveur, le rêve

des notes
sans but

l’homme balaie lentement son balcon
les rêveurs resteront

la cour est vide
et le ciel est strié de branches

il sait l’hiver sans trop y croire
tant que la vague reste douce

le vent s’élèvera
à temps

Photo – LA MÉLODIE D’UN SOIR * Début janvier 2020 – Montréal

Encore d’errance

l’hiver
dans sa lumière
et le jour déjà
redevenu plus long

je te vois faire
et peindre
y donner sans t’en faire
puisque t’en faire n’y ferait rien

à ta manière ou
à la mienne
rendre à la nuit froide
de ce feu qui nous brûle

et sur la même errance
toucher l’azur béant
où le coeur s’apaise

 


Photo – BLANCHE NOCTURNE * Rue De Bullion, Fin décembre 2019 – Montréal

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