Amenez-moi du temps

Le temps.
J’vais le prendre le temps.
Pour faire ce qui en vaut la peine.
Rien faire, par exemple.
Avec quelqu’un que j’aime.

Amenez-en du temps.
Avec rien à faire.
Pis du monde que j’aime.

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Un beau jour de printemps, dans une ruelle de Rosemont

Constat d’accident

De ce petit bouquin
qui a valsé pendant un temps
entre mes deux paires de lunettes
dans le fond de mon sac à dos
… et qui, si léger soit-il
n’y aura traîné tout ce temps
que parce que Paul Auster m’inspire…
de ce bouquin, dis-je
je retiendrai une autre phrase
qui me semble dire presque tout
de ce qu’il y a vraiment à dire :
« Nous devons nous aimer les uns les autres ou mourir. »

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Et moi, le temps de quelques minutes,
bien au chaud à Montréal
dans ce printemps qu’on trouve froid,
je pense à Mogadiscio, Damas, Jérusalem, Kaboul
et combien d’autres villes où je ne suis pas
et je me prends à imaginer
qu’un jour peut-être on mentira
en se disant au lendemain
ou à la veille d’un attentat.

La peur au menu

Depuis toujours si efficace pour asservir…
on la sert encore aujourd’hui
en beau poison à toutes les sauces.
Et plus elle paralyse, mieux c’est.
Car comment mettre à mal l’assurance et la protection?
Ou s’indigner de la prudence et de la prévention?
Ainsi gaiement on l’alimente.
Pour mieux nous en gaver.
C’est devenu ô tellement facile d’en faire un plat.

Par chance que les arbres sont beaux.

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Il était une fois… un livre rouge

Je sais qu’il lui arrive de la voir comme un grand livre.
Ouvert sur de belles pages blanches.
Et que ces jours-là encore plus que les autres,
elle tente d’y écrire ce qu’elle sait de l’espoir.
Et de l’art pas toujours facile qu’est celui d’être heureux.

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Traversée d’avril

Suis rentrée chez moi hier
les bottes complètement trempes.

Ai pris une longue marche avec mon amie Christine.
Vu ma tendre Anick au café.
Promené mes pieds deux heures dans cette neige lourde d’avril.
Une autre tempête.
Comme une main pesante qui s’attarde sur votre épaule.
Qui s’y dépose éperdument avant de vous quitter.
Et mes bas qui sèchent sur le radiateur.
Et mon manteau accroché à la pôle de douche.
Et mon sac à dos vidé qui pend à une porte.
Elle était lourde et gorgée.
Mais belle et blanche.
Et lumineuse.

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La montagne est discrète

Elle est discrète, et pourtant elle est là.
Prête à m’accueillir quand j’ai besoin d’elle.
Avec ses arbres, ses houlements,
ses tournants, ses rochers.
Elle me fait du bien, la montagne.
Elle a une âme pour moi. Une vie.
Une oreille pour m’entendre.
Une nature pour me parler.
Elle fait écho à mon silence.
Et à mon discours intérieur.
Une chance que je l’ai.
Sans elle, Montréal ne serait
qu’une fraction de ce qu’elle est.
La montagne, c’est le coeur de ma ville.

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À cheval sur nos ânes

J’étais sur la 10 hier
au beau milieu de l’après-midi
direction Bolton
et malgré la quasi-absence de soleil
pendant plusieurs minutes
la lumière
et tout le reste
m’ont semblé parfaits
et ne cherchez pas de lien
bien qu’il y en ait toujours
mais voilà que ce matin
j’ai lu et aimé :
« À l’époque, la question était moins de me chercher une vie que d’essayer d’en inventer une à laquelle je puisse croire. »
Extrait de Constat d’accident et autres textes, Paul Auster, 2003, chez Actes Sud.

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Sales fenêtres

Parce que l’aigreur
me donne
infailliblement
mal au cœur
comme un mauvais hamburger
et le mépris
royalement les bleus
et sans doute très mauvaise haleine,
je préfère m’amuser.
Et de beaucoup, l’amour au reste.

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