Vains, tes neuf fous !

j’ai poussé la chaise
sous le chaud des rayons

à l’ombre
le vent frais me dit trop fort la fin

par chance qu’il y a l’impermanence
de la nuit et du froid

par chance aussi les rires
par-dessus la mort

la mort qui depuis le printemps
me fredonne plus fort
son étrange rengaine

 


Photo – UN REFLET DE L’AUTRE * Le 26 août 2019 – Montréal

Méta fjord

si je te dis
la goutte au coeur de l’océan

et le vent qu’on ne sait
que par le gauchi de l’enfance

comprendras-tu mieux mon silence?

je préfère les vallées lyriques
et les imaginaires tendres

les grands métas et les fjords
qui font valser nos âmes

Photo – BOUT DE CIEL D’AOÛT SANS RETOUCHE * Le 22 août 2019 à 18 h 45 – Montréal

Et l’ivresse ressuscitée

le cœur tendu
le corps aussi

des mois d’émoi
et l’ivresse ressuscitée

le drame petit
le petit drame
toujours celui du temps qui passe

de toute manière

c’est toujours court

trop court

devant la beauté

qui reste

la beauté

qu’il nous reste

 


Photo : LE TEMPS SURVIT * Sur le mont Royal – Août 2019, Montréal

Et encore

J’ai sûrement mis les pieds dans un carré mouillé.
Un carré de sable déjà souillé.
Mais tu vois, en dépit de nos solitudes, j’ai envie de garder espoir.
Alors, ne m’enlève pas le rire. Ne m’arrache pas mes beaux délires.
Et je t’en prie, n’infuse pas trop d’amers dans mon thé quotidien.
La vie, malgré ses failles immenses, regorge de tant de beautés.
Et le temps que j’y suis, je voudrais y puiser encore.

 


Photo : POUR LA SIMPLE BEAUTÉ * Sur le mont Royal – Août 2019, Montréal

Possession simple

Quand la notion de propriété permet les gestes les plus immondes,
qui va pleurer de simples guêpes?

Un nid gros comme un ballon de football.
S’il n’en avait tenu qu’à moi, je l’aurais contourné.
Jusqu’au grand froid, qui l’aurait décimé.
Mais je ne vis pas seule. Alors.
J’ai tué des guêpes. Laissé tuer des guêpes.
Ravagé une colonie accrochée dans la cour.
Trop près de nos têtes, m’a-t-on dit. C’est risqué.

Disons aussi que je me méfie des contentieux territoriaux.

Photo : VIVRE * 18 août 2019, Montréal

Le pesant doux

le vent frais sur mon bras
et mes orteils moins chauds qu’hier

les yeux sur le rideau qui flotte
je sens août qui décline

et nos pas qui se mêlent
s’emmêlent
et nos corps hésitants

qui de qui
de nos âmes danseuses

j’en aurais pris encore
du pesant doux de juillet
encore de ces jours lourds
qui me prennent à moi-même

le temps n’arrête pas sa danse
même sur l’été d’après
le dernier printemps d’elle

 


Photo : UN QUELQUE CHOSE D’AVANT – Dans le chalet du mont Royal * 16 août 2019, Montréal

Les belles oubliées

devant l’insaisissable
le solide et l’impénétrable
se payse l’art de la fuite
bienheureuse

d’un seul doigt la lumière
qui s’allume
et l’ombre devient rose

et ma peau, c’est vrai
qui se rapproche du papier
je n’avais pas remarqué, tu vois
ou j’avais oublié

c’est qu’il y a tant de choses belles
et tant de choses que j’oublie

Photo : VIVRE EN DESSOUS DU CIEL – Rue St-Laurent, Mi-août 2019, Montréal

Jours d’aronia


t’avais vu juste, oui
arrivés au bout d’une terre
la mer qui s’étend devant nous

et l’aube
qui ouvre le chemin

depuis hier, j’ai équeuté
des centaines de grappes d’aronia
que j’ai dû cueillir hâtivement
parce que des branches devenues lourdes
pendaient jusqu’à la rue
à hauteur de tête d’homme

pendant ce temps, la rivière
coule belle à en pleurer
vers ce qu’elle sait déjà

comme les vagues et l’horizon
nos finitudes qui se déploient

entre la lie et le liant
ce qui nous tient et nous sépare

en attendant, la nuit se donne
et le jour pareil

 


Photo : COULURES (autoportrait) – 13 août 2019, Montréal

Cerises et roses

j’aime encore les roses
aussi fort les roses
et t’aurais dû me voir hier
m’incliner devant elles
pour humer le cru
de leur rose dentelle

par chance que mon nez
compense un peu nos idioties

et après les roses d’hier
y a eu les cerises sauvages
qu’on a faites en coulis
puis sa voix tranquille qui m’a dit
j’espère qu’il y aura des cerises
quand je serai grande

Photo : LA VIE DEVANT ELLE – Le 9 août 2019, Montréal

Un cri quelque part

ne sachant pas de voix
ou laquelle écouter
je tends l’oreille au ciel
et à l’été qui passe

et là, tout de suite
à l’asphalte noirci par la pluie
et aux feuilles devant
presque parfaitement immobiles

encore ce grincement de la douche
qu’on a continué d’endurer

son double cri matinal
parce qu’il faut bien, semble-t-il
un cri quelque part

l’air est lourd comme je l’aime
et va savoir pourquoi je l’aime
un bonheur chaque été teinté
de mélancolie
sachant que rien ne dure

 


Photo : VILLE – Début août, Montréal 2019

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