S’attarder ensemble

j’y pense
comme à un amour clair

un champ où les oiseaux
peuvent passer la nuit
ou s’attarder ensemble
dans les montagnes autour

et la lune qui se penche
si seulement j’étais la lune

tu dis qu’il y en aura encore
la vie regorge d’amours clairs

Photo : BORD DE BROUSSAILLE – Avril 2021

Le matin d’après

Je sais nos démesures, et quelques chants qui te consolent. Il reste que tu as raison : malgré mes lieux d’apaisement, mon entêtement est bien vivant. Mais là où j’étais batailleuse, je m’assois plus souvent qu’avant, tranquille dans la rumeur, le regard vers le jour, l’oreille vers le vent et l’oiseau. Je sais mes os remplis d’histoire, ma chair restée teintée de rêves. Je voudrais te dire le chemin, mais ce n’est pas le mien. Ni celui où je t’aime.

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Photo : LA VIEILLE MAISON – Toujours sur la route 327

L’oiseau, la rivière et la bride

Sans trop savoir pourquoi, j’aime ces vieux bâtiments qu’on voit le long des routes, ces vieilles granges surtout, de bois gris. C’est peut-être l’histoire qu’elles racontent en silence.

Puis il y a l’oiseau du matin. La rivière, la mer, et le sens du désir. Ce qui n’arrête jamais vraiment, ni du vent ni de l’âme. Et tout ce qu’on fait quand même pour y brider le jour.

J’ai mal à mon monde qui laisse faire les fous. Et moi qui ne sais faire que l’écrire.

Photo : DANS L’ERRANCE DU TEMPS – Avant-hier, sur la route 327

Clair jardin

la beauté est tenace
son chant résiste
aux assauts de l’absurde

aux violences d’un certain silence
et aux paroles vides de sens
j’oppose jusque dans la nuit
des lieux de poésie
pour autant de patience

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Photo : LA GRIVE EST REVENUE – Hier matin – Montréal

J’y suis, c’est tout

Les bourgeons sont capés de neige.

Pieds nus sur la terre froide, mon regard se souvient du tien. La lumière du blanc peut-être, ou le sang de la voix resté pris dans la gorge.

J’y suis, c’est tout. Avec ce que le temps révèle. De ces nuits où il faisait gris au creux d’une enfance trouée. Et du beau qui s’accroche dans l’étreinte des jours.

Photo : HIER, UN MUR

Le temps autrement

Ça fait un bout qu’on ne t’a pas vu, même pas dans le tournant.

En attendant, par ma fenêtre, le temps passe autrement. Le bourgeon et l’oiseau ont ouvert le passage. Ce matin par exemple, tu verrais le ciel gris, l’asphalte éclaboussé, l’absence de vent, et les gouttes qui tombent du ciel et de l’érable.

Je serai là quand tu passeras. Entre les mots, sur le clair chemin de l’errance.

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Photo : DE PLUIE ET DE CHARBON – Avril 2021 – Montréal

La peau des fleurs

c’est vague, tout ça –
la mer peut-être

ou ta mère qui sait

le rouge encore caché
au plus près de ta langue

mais si c’est d’écrire pour te vivre
et pour ces traces laissées
en chemins d’espoir et de peine
comment dire les yeux
d’avant les trottoirs durs
et ceux d’après
le frôlement des corps

par l’oiseau peut-être
et la peau tendre des fleurs

Photo : SOUS L’ESCALIER – Ce matin

Encore moi et mes bottes

je te vois ma colère
bouffie de nostalgie
moi la fille d’ici
sans boue dessus mes bottes
autre que celle que j’ai choisie

et si je pleure
à perdre une aube familière
je sais les ombres qui basculent
avec et sans moi
et le temps voué à y faire
tous les matins du monde

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Photo : SUR UNE BUTTE – Avril 2021 – Montréal

En soûlant l’invisible

apostrophe
mais j’évite

ce sera moi demain
moi qui saluerai l’aube
des yeux ou des paupières

je grugerai mes barreaux
tandis qu’ils s’amuseront
à caler des entrées de terre blanche

et en dépit des arbres
et du vent qui jamais jamais ne s’épuise
je penserai à ces jours
que je t’aurais fait goûter
à l’écume qu’on buvait
en soûlant l’invisible

Photo : FAUSSE MER – Hier, au bassin presque vide du parc Lafontaine.

Le sens tendre du jour

et s’il faut
désarmer le silence

un rayon a changé la lumière
sur la maison d’en face

une fille promène son chien

une feuille tombe qui était restée là
accrochée à son arbre

ce sera toujours devant qu’il m’a dit
et les mêmes fossés

le sens tendre du jour
sans le lourd
ni le piano d’avant

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Photo : FENÊTRE – Avril 2021 – Montréal

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