Le flou d’ardeur

Je ne sais rien sinon que tout traverse tout. Et que l’eau y tombe toujours avant que la terre soit mouillée.

Elle m’a dit ça il y a vingt ans et j’ai pas oublié. On riait et pleurait beaucoup quand on était ensemble. On s’était réservé les soirs pour se dire les choses. La maison était assez grande pour qu’on puisse y vivre à plusieurs. On y avait passé l’hiver, Marie et moi. Tous les matins quelqu’un veillait à faire un feu. Le monde voulait une promesse qu’on refusait de faire. Et les jours se levaient les uns après les autres.

Je n’ai pas peur de l’invisible. Mais il y a trop de parenthèses et on finit par échapper le sens du beau et du sauvage. Et pourtant on le sait, les fous aussi le savent, que tout est déjà là. Et quand même on joue de contraintes, d’un flou d’ardeur dans le mensonge.

J’ai croisé Marie l’an dernier. On a marché un peu dans les traces d’avant. Tout avait été dit. On s’est embrassées tendrement. Le temps fait bien les choses quand on le laisse faire.

Photo : BOUE – Fin mars 2025 – Champ des possibles * Montréal

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