J’écris pour l’ivresse tranquille. Pour déjouer mon vertige devant la bêtise assassine. J’écris pour le refuge et la patience nécessaire. Pour me rappeler aussi que la neige sera belle. Et je marche. Pour les mêmes raisons.
Photo : MAILLES DE LUMIÈRE – Montréal * Décembre 2022
Quand j’ai rentré le géranium, j’pensais qu’il fleurirait encore. Mais j’avais tort. Il se tord, le pauvre. On dirait un chagrin d’hiver. Comme un chagrin d’amour.
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encore le ventre un peu comme la mer un grand ciel ouvert au naufrage après une longue escale
j’ai marché pour prendre le vent me suis arrêtée quelque part avec un cahier dans mon sac
là la ligne d’ombre sur l’asphalte et un passant dans la lumière ni plus ni moins qu’une rivière
pis mon café pendant qu’il dort
j’m’enfarge souvent quand ça s’embrouille comme dans les lignes d’un trottoir
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Photo : MILLE FOIS LA LAU D’UN JOUR – Montréal – Décembre 2022
C’est peut-être une intransigeance, un aléa de caractère. Mais ça peut aussi rester vague. Une rivière qui se déchaîne sur nos tendresses étriquées. Ou bien éperdument la lune, contre rien ni personne. Avec de quoi errer encore dans nos ruelles de fin d’automne.
Photo : LE BLEU DU TOMBANT – Montréal – Décembre 2022
J’écoute la même pièce en boucle, une guitare seule, juste assez maladroite. Il m’arrive de croiser l’homme qui l’a créée. La dernière fois, il posait sur un chien un regard plein de bienveillance. La fois d’avant, il sautillait pieds nus avec un gros chat dans les bras. Il vit dans le quartier préféré de Christophe.
J’ai retrouvé la vieille photo que je croyais être de toi. Mes pensées sont si défaillantes, peut-être leur manière de se rire de moi.
Les nuits sont de plus en plus froides et les jours de plus en plus courts. Depuis des semaines, je regarde par la fenêtre les têtes noires des rudbeckies balancées par le vent. Et là ce matin, la blancheur. Pour une deuxième fois.
Quand même je sais ce qui fondra. La neige, pas les oiseaux.
Je n’ai pas de réponse à la question posée. Que mes yeux sur des pages. Et n’avoir rien à perdre contre rien à gagner.
La neige n’est pas restée. Bien sûr les grands rosiers qui se fanent quand même. La terre fait ce qu’elle fait. Et le ciel qui reste sauvage.
Le long des eaux, les berges s’illuminent. Et plus près sur l’asphalte, la lueur qui vient se poser. Le banal ne peut rien contre la montée de l’aurore.
Photo : SUR LA CROISÉE DES CORPS – Montréal * Novembre 2022
La nuit m’a prise et enveloppée. Et te dire pour le reste. Question de mer peut-être et de ciel grand ouvert. De vent et de naufrage. Au fond, je n’en sais rien. Mais le soleil est blanc. Et l’hiver prend doucement sa place.
Photo : LE THÉÂTRE DU FROID – Montréal – Novembre 2022
Encore ce matin la rue immaculée de neige et le ciel en miroir.
Si tu vivais ici, on marcherait sûrement ensemble. Et d’une journée à l’autre, je n’ pourrais pas te dire si c’est le gris du temps ou le gris de mon âme qui fait affleurer la tristesse ou sinon le ciel bleu ou mon âme légère qui me grise et m’emporte.
J’imagine sous un ciel
Après la neige, une ombre bleutée
Des pas feutrés,
non, un léger grognement à chaque pas
Les oiseaux sont couchés ?
Juste un rouge-gorge bravache qui tente une sortie.
ÀmiRliton
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Photo : LA BELLE SAINT-LAURENT – Montréal * Novembre 2022